Comment, à 40 ans, l'amour m'a (presque) tué.
J’ai 40 ans. Dans la force de l’âge. En bonne santé.
Des enfants magnifiques.
Une vie professionnelle plutôt épanouissante.
Une vie sentimentale en ruines.
Pour mes 40 ans, ma mère m’a écrit ceci :
« Il y a 40 ans, je mettais au monde un petit garçon tout mignon, au visage ouvert, rigolo …
Ton Papa et moi, nous avions vu en en toi un futur bon vivant.
Pendant toute ton enfance, tu n’as jamais démenti cette première impression : garçon agréable, gentil, voyant toujours le bon côté des évènements (les enjolivant même parfois légèrement si nécessaire). Content de toi, à juste titre, car intelligent et t’intéressant à tout.
Plus grand, tu me disais : « ne t’inquiète pas, Maman » lorsque je trouvais que tout n’était pas parfait.
Que s’est-il donc passé ?
Qui a transformé ce gars ouvert, joyeux, optimiste, bon vivant, sûr de lui, en cet homme angoissé, défaitiste, triste et malheureux ?
Où était-il, mon fils, pendant toutes ces années ? Je ne le reconnaissais pas … ou si rarement. »
Il y a un an et demi, j’ai quitté ma femme, la mère de mes enfants.
Nous étions ensemble depuis l’âge de 21 ans.
Parents à 23, mariés à 24, puis à nouveau parents à 25 et 32 ans.
J’adore mes enfants, mais je ne supportais plus cette vie.
M’échinant à travailler le plus possible pour apporter à ma famille ce dont elle a besoin, mon couple était défaillant en termes de communication.
Incapable de m’affirmer dans cette vie, les disputes ont toujours été nombreuses, j’ai encaissé pendant des années violences verbale et physique, sans broncher, ou presque.
Et puis un jour, j’ai compris, parce qu’on me l’a expliqué, que cette situation n’était pas normale.
Je ne m’en étais jamais ouvert auprès de mon entourage proche, et puis ma femme a émis des doutes sur son amour à mon égard.
J’ai alors commencé à m’ouvrir sur le sujet, auprès de personnes qui m’ont touché, par leur bienveillance.
Et fatalement, mon cœur a fait des siennes.
Pour autant, je n’ai jamais trompé ma femme. Je l’aimais.
J’ai essayé, tant bien que mal, de maintenir mon couple à flots. Sans succès.
Les disputes s’enchainaient, les mots étaient de plus en plus durs à entendre. Il fallait en finir.
J’ai donc voulu partir.
Mais partir au sens létal du terme.
Le lendemain d’une violente dispute, où la peur m’a envahi, mon courage m’a abandonné.
J’ai voulu disparaître.
Lors du passage à l’acte, l’évocation de mes enfants m’a retenu, in extremis.
Je suis parti de la maison, pour ne plus être en contact avec la personne qui, je le pensais, m’empêchait d’être heureux et vivant. Pour me protéger avant tout.
En quelques semaines, j’ai repris goût à la vie, je me suis senti plus libre, libre de vivre.
J’ai rencontré quelqu’un qui m’a fait vibrer comme jamais.
Je n’ai pas su totalement me détacher tout de suite de ma femme, jusqu’au jour où j’ai enfin compris que la vie n’était pas de ce côté.
J’ai découvert un amour véritable, une vie comme je n’osais la rêver.
J’étais heureux, à nouveau en pleine confiance.
Une vie en harmonie avec mes aspirations profondes, enrichissante, épanouissante, correspondant à mes valeurs.
Au point qu’au bout de quelques mois, nous nous sommes installés ensemble.
Une nouvelle vie parfaite, un monde parfait, un amour idyllique…
En fait, ça a été le début d’une descente aux enfers.
Jaloux d’un ex toujours très présent, que ma compagne voyait régulièrement, je subissais une pression énorme parce que ma jalousie devait être étouffée, pour satisfaire son indépendance.
Ce n’était qu’un ami, mais de plus en plus présent, et toujours dans mon dos.
Cet « ami » avait juré ma perte, parce que selon lui, je lui avais volé « sa » femme…
Jaloux, possessif, invasif, dès lors, c’est comme ça que j’étais perçu par ma compagne.
Mon stress permanent m’était reproché à maintes reprises, je souffrais toutes les comparaisons possibles…
Bref, j’ai perdu le sommeil, l’appétit, mes forces… Je suis tombé malade.
Malade d’amour.
De malaises en malaises, ma compagne m’a mis dehors, pendant qu’elle se rapprochait toujours plus de son ex, au point de passer une nuit, puis un week-end avec lui.
Cette compagne n’était pas n’importe qui. Nous nous connaissions depuis l’âge de 3 ans, avions fait notre maternelle et notre primaire ensemble, nous étions notre premier amour, durant toutes ces années.
Elle comme moi, nous nous sommes dits que nous étions finalement l’amour de notre vie.
Se retrouver après presque trente ans et être toujours aussi complices, avoir toujours autant d’atomes crochus, et avec des sentiments très forts l’un pour l’autre…
Comme elle aimait le dire, ensemble, nous étions complets.
Une belle histoire, une magnifique histoire.
Je n’ai pas hésité à partir loin de mes enfants pour mon propre bonheur (contraint par des aspects matériels également, mais c'est moins magique...).
Et donc, persuadé jusque-là que cet amour était infini, je me suis retrouvé à la rue, n’ayant que mes yeux pour pleurer, devant quitter cette nouvelle vie dans laquelle je m’installais à peine.
Je me suis effondré, mon corps me lâchant à maintes reprises, je n’ai pas supporté.
Etant loin de tout, et loin de tous mes proches, plus rien ne me retenait.
A bientôt 40 ans, je mettais fin à mes jours.
Plus de souffrance, plus de malheur, plus rien. Rien que le néant d’une mort libératrice.
Cela n’a duré que quelques secondes, quelques minutes au plus.
Et puis la souffrance est revenue.
L’ex m’a trouvé, m’a ramené à la souffrance.
Hôpital, psychiatre, famille, parents et enfants, collègues et amis pour m’héberger, psychologue, assistante sociale, thérapie… Essayer de reprendre pied, de reprendre goût à la vie.
Indifférence totale de cette femme que j’ai aimée, à la vie, à la mort.
Aujourd’hui, je ne crois plus au bonheur total, à la plénitude, on m’a retiré la joie de vivre.
Cependant, pour mes enfants, et pour leur équilibre, je vais essayer de reconstruire quelque chose, de neuf, en famille.
Voici ce que j’ai répondu à ma mère pour cet anniversaire qui aurait dû être l’anniversaire de la maturité :
« Il y a 40 ans, tu mettais au monde un p’tit gars, semble-t-il bon vivant, rigolo, mignon, etc.
Il a aujourd’hui 40 ans, a priori il n’est pas si laid que ça, il sait profiter des bonnes choses, a un certain sens de l’humour, n’est pas trop bête, et sait ce qu’il doit faire pour le mettre à profit et le partager.
Il y a cependant une différence. Entre-temps, il a rencontré l’amour, et ça ne s’est pas très bien passé.
Pour autant, il est vivant, en bonne santé, et fera tout pour le rester. »
Si j’y arrive. Mais si je n’y arrive pas, cette fois, on ne me retrouvera pas.
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